PIANOS ESTHER

La plus ancienne maison de pianos de Wallonie

 


Que voulez-vous savoir sur le piano ?


1. Ah ! si j'avais un marteau...


La tête de marteau, mise en mouvement par le jeu du pianiste, va percuter la corde. Elle va transmettre à la corde une partie de son énergie cinétique (*) qui sera transformée en vibrations. Les vibrations de la corde vont se transmettre, via les chevalets, à la table d'harmonie dont le mouvement vibratoire va à son tour se transmettre à l'air ambiant pour atteindre le tympan de l'oreille.
Le caractère du son, dur ou chantant, métallique ou rond, et sa richesse en harmoniques dépendent pour une part essentielle de la tête de marteau.
Cette tête est composée d'une âme en bois entourée de feutre de laine. La sélection rigoureuse du bois (hêtre, charme, acajou,...) et du feutre (choix de la laine, épaisseur et densité, forme...) joue un rôle primordial dans la production du son.
Tout ceci montre combien une tête de marteau sélectionnée avec soin et bien adaptée est un élément-clé de la qualité du son d'un piano. La maison Renner, qui fabrique des têtes de marteau, peut proposer en catalogue jusqu'à 512 modèles différents.

(*) Energie cinétique : E = 1/2 m . v2 (E : énergie cinétique, m : masse, v : vitesse).



2. La table d'harmonie


Sur cette planche de conifère dont la banalité et la vigueur intriguent, j’hésite à apposer le nom, le beau nom sonnant de table d’harmonie (hommage à Françoise Sagan). La table d’harmonie est le feuillet de 9 millimètres d’épaisseur et de 1 à 2 m2 de surface qui transmet à l’air ambiant les vibrations des cordes. Formée d’un assemblage de planchettes d’épicéa, elle est la structure centrale du piano. C’est aussi la partie la plus délicate de l’instrument, celle qui assurera la qualité du son. L’épicéa qui la constitue proviendra d’un arbre sélectionné avec soin qui aura grandi dans le froid et avec lenteur sur un terrain pauvre : ainsi les cernes seront réguliers et serrés et le bois peu chargé de résine, assez clair. La fonction de la table d’harmonie sera d’autant mieux remplie qu’elle conduira les vibrations avec vitesse et sans déperdition d’énergie. L’origine et la qualité du bois d’épicéa choisi sont très importantes. Les pianos japonais et autres asiatiques utilisent essentiellement pour les tables d’harmonie de l’épicéa du Canada (picea sitchensis Carr. appelé aussi Sitka) et cela explique en partie leur sonorité plus pauvre et plus agressive. Les fabrications allemandes ou tchèques ont gardé par tradition l’épicéa européen (picea abies Karr = picea excelsa Link) qui confère un son plus chaud et velouté. Le feuillet de la table d’harmonie est renforcé par de longues et fines lattes, les barres de la table d’harmonie ; l’ensemble supporte les chevalets qui sont en hêtre ou en lamellé de hêtre. Les cordes, qui pressent les chevalets, transmettent leurs vibrations à toute cette vaste structure. Cette transmission d’énergie ne se ferait pas dans de bonnes conditions si la table n’était pas sous tension. Pour ce faire, celle-ci est galbée comme une feuille de papier qui serait appliquée sur un globe ou un cylindre. Ce galbe n’est pas obtenu comme le font les luthiers pour les violons par enlèvement de matière par copeaux, taille ou ponçage, mais bien par contrainte. Cette contrainte pour mettre la table en forme (plus ou moins sphérique, cylindrique chez Blüthner, ou ellipsoïdale) est effectuée avec des techniques diverses où la tradition, l’expérience et la recherche appliquée jouent des rôles variables selon les facteurs de pianos : pressage par moule, préformage des barres, adaptation à la ceinture périphérique sur laquelle la table est collée, collage sous charges etc. vont avoir un rôle dans la qualité et la stabilité de la structure de résonance. Prévenir les fentes et les décollements, travailler le bois pour éviter des déformations, voilà bien encore les soucis des fabricants. La bonne sonorité d’un piano et le maintien de celle-ci dans le temps ne sont pas l'effet du hasard. La complexité fonctionnelle de la table d’harmonie peut être aperçue en imaginant ceci : prenons un accord de 3 notes. Les trois touches enfoncées au centre du clavier vont faire vibrer 9 cordes d’acier, chacune de ces cordes étant tendue avec une force de l’ordre de 110 kilogrammes-force (env. 1079,1 N). Ces cordes appuient sur le chevalet en pressant en quelque sorte la table d’harmonie. Les vibrations générées par les trois notes ont des fréquences différentes. Chaque corde présente un spectre de fréquences complexe où le transitoire d’attaque, le son fondamental, les harmoniques et le transitoire d’extinction jouent avec le temps (certains harmoniques s’éteignent vite, d'autres perdurent longtemps) et avec l’intensité (tel harmonique, plus intense, surnage etc.). Cet ensemble de vibrations est donc transmis à la table d’harmonie. Les zones de diffusion des vibrations se trouvent à différents points du chevalet et de la table pour chacune des neuf cordes. A partir de ces neuf zones, les ondes se propagent à la manière des ondes que neuf cailloux jetés dans un étang font apparaître en surface. Cependant cette propagation dépend du lignage de la table, de son barrage, du galbe et de la pression subie à chaque endroit. Les vibrations nées à partir des 9 zones vont aussi rapidement se mêler, s’amplifier l’une l’autre ou s’opposer, se concurrencer… Cet ensemble complexe de vibrations va s’étendre à toute la table d’harmonie et venir se réfléchir sur ses bords en entretenant ainsi le mouvement de cette véritable membrane qu’est la table d’harmonie, source sonore qui abreuve l’oreille.

Imaginons maintenant les vibrations de la table d’harmonie non pas après un accord de trois notes mais au cours des quelques minutes de l’exécution du Nocturne n°2 de Chopin qui va enchaîner une centaine d’accords reliés dans un ensemble de quinze cents notes… Dire maintenant qu’un synthétiseur électrique (appelé aussi piano électrique…) a le son d’un vrai piano est un bien laid mensonge dont pourtant des vendeurs peu scrupuleux ne se privent pas. Certaine fabrication de tables d'harmonie comporte des raffinements supplémentaires pour améliorer le son. Chez August Förster, la table pourra être libre dans les zones proches des extrémités des chevalets. Chez Blüthner, la partie haute du chevalet est doublée d’une fine couche d’acacia qui assure une meilleure transmission des vibrations les plus aiguës. Beaucoup de facteurs de pianos ont fait preuve d’imagination dans leur conception du chevalet des basses qui devient une véritable sculpture. Ibach a réalisé des tables d’harmonie doubles ! Blüthner, encore lui, par son système Aliquot, dispose une quatrième corde dans l'aigu qui sonne par sympathie…

Quelques expériences pour éprouver la qualité de la sonorité d'une table d'harmonie de piano :
1. faire sonner le La3 et écouter le décours du son jusqu'à son extinction (pour beaucoup de pianos le son s'éteint plus ou moins vite ; pour d'autres le son se développe avec beaucoup d'irrégularités ; les meilleurs offrent un son régulier et très tenace qui durera jusqu'à 25/30 secondes)
2. libérer l'étouffoir du La3 et faire sonner le La2 quelques secondes ; par sympathie les cordes du La3 vont résonner seules
3. faire sonner un diapason et le mettre au contact de la table qui va amplifier les mouvements vibratoires.



3. Le sommier


Dans le sommier sont fichées les chevilles. Elles y tiennent par friction. Elles sont un élément-clé de la bonne tenue de l'accord du piano, puisque chacune assure la stabilité de la corde qui est tendue avec une force de plus de 100 kg.



  1. Sommier en hêtre massif
2. Doublure du sommier
3. Alvéole d'une cheville
4. Blocs d'épicéa assurant la liaison au barrage
5. Latte de chêne (pour le filet des vis du cadre)
6. Latte de barrage de la table
7. Epicéa de 9 mm d'épaisseur correspondant à la table d'harmonie
8. Latte de hêtre (soutien du cadre)
9. Planche de protection arrière en hêtre
10. Planche de protection supérieure en chêne

Coupe des parties boisées supérieures du piano droit Pleyel n°136 236,
modèle n°6, année 1905 (sommier sur le haut du barrage).
Collection Pianos Esther.

On remarque que le bois de hêtre du sommier présente des cernes parallèles au plan des chevilles. Cela est nécessaire pour prévenir tout éclatement du bois. La doublure est une mince couche de hêtre sur quartier qui affermit la tenue horizontale des chevilles.



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